Au Taillan-Médoc, une pratique ancestrale impliquant les habitants dans l’abattage d’arbres allie gestion de la forêt et économies de chauffage. Focus.
Pratique ancestrale dont les origines remontent aux temps du Moyen-Âge, l’affouage désignait, originellement, le droit accordé par un seigneur local aux habitants de son territoire pour récolter du bois de chauffage dans les forêts de ses domaines. De nos jours, l’affouage consiste, pour un habitant d’une commune forestière, à faire son bois de chauffage dans les massifs de la municipalité en contrepartie d’une taxe, le plus souvent modique, versée à la commune en question.
Fort regain d’intérêt
Cette tradition méconnue est encore vivace dans certains territoires français. Ainsi au Taillan-Médoc, près de Bordeaux, où chaque année a lieu sous l’égide de la municipalité un tirage au sort attribuant aux administrés le droit de couper eux-mêmes leur bois de chauffage, tout en participant par la même occasion à l’entretien du domaine forestier public. Si les places sont chères – 10 lots cette année pour une trentaine de personnes intéressées –, Michel Bondi, adjoint au maire du Taillan-Médoc, se félicite du succès non démenti de l’opération. Car au-delà des considérations financières et d’aménagement public, « c’est vraiment le maintien du lien social avec les administrés qui est important », estime l’élu local.
Si la pratique de l’affouage a toujours existé, elle bénéficie aujourd’hui d’un fort regain d’intérêt. Guerre en Ukraine, crise énergétique, explosion des tarifs des énergies fossiles et de l’électricité… De nombreux ménages se sont reportés vers le chauffage au bois ou aux granulés. Et avec un prix moyen de 10 euros par stère de bois, l’affouage est une solution d’autant plus économique.
Un deal gagnant-gagnant
Mais l’affouage ne se contente pas de séduire par ses évidents avantages économiques. Strictement encadré par l’Office national de forêts (ONF), l’affouage participe pleinement de la gestion globale de la forêt, en contribuant à l’entretien régulier des parcelles allouées. L’affouage « crée des respirations dans la forêt pour que les semis puissent pousser avec plus de lumière et de place », explique Laurent Viennet, de l’ONF.
Par leur action, les affouagistes participent activement « à la gestion sylvicole de la forêt communale », détaille également le site de l’ONF : « en prélevant un certain nombre de jeunes arbres identifiés par le forestier, (les affouagistes) permettent en effet aux autres (arbres) de mieux se développer ». Enraciné dans l’histoire millénaire de nos territoires, l’affouage répond donc à des enjeux on ne peut plus contemporains : permettre aux citoyens de résister aux soubresauts des marchés de l’énergie et contribuer à rendre les forêts plus saines et plus résilientes face aux inévitables conséquences du dérèglement climatique. Un deal gagnant-gagnant, donc.