En convalescence à Paris, le Premier ministre ivoirien n’en demeure pas moins aux manettes du pouvoir et semble peu à peu s’imposer comme le seul candidat à même de poursuivre l’héritage d’Alassane Ouattara.
Le Premier ministre de Côte d’Ivoire est à Paris. Amadou Gon Coulibaly est arrivé dans la capitale française le dimanche 3 mai, afin d’y subir, dans l’enceinte de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, une série d’examens médicaux. Rien à voir, cependant, avec une quelconque contamination au Covid-19 : âgé de 61 ans, le chef du gouvernement ivoirien a subi une lourde opération du cœur il y a une dizaine d’années, à la suite de laquelle il est régulièrement suivi par des médecins. « Il va bien », a tenu à rassurer une source interne à la présidence ivoirienne, présidence selon laquelle Amadou Gon Coulibaly « poursuivra son séjour en France pour quelques semaines avant de regagner la Côte d’Ivoire ».
Pas d’impact sur les activités de l’État
« Le Premier ministre va très bien », a confirmé, lors du conseil des ministres du 6 mai, le président en exercice, Alassane Ouattara. De fait, l’absence momentanée d’Amadou Gon Coulibaly n’entraîne pas de vacance du pouvoir, son ministre de la Défense, Hamed Bakayoko, assurant l’intérim pendant le temps que durera sa convalescence. Un Premier ministre intérimaire qui n’entend pas faire d’ombre à son supérieur et qui a « vivement demandé à ses proches de surseoir à toutes initiatives de le mettre en avant ».
Après ses examens médicaux, Amadou Gon Coulibaly s’est immédiatement remis à la tâche, bien qu’à distance et de manière allégée. Le travail ne manque pas, le Premier ministre devant notamment mettre en œuvre le « Plan de riposte sanitaire » et le « Plan de soutien économique, social et humanitaire » décidés pour lutter contre l’épidémie de coronavirus et ses conséquences. À ces fins, il a participé mi-mai à une visioconférence avec le chef de l’État, Alassane Ouattara, moment qui a été retransmis en direct sur les réseaux sociaux — le président ivoirien n’hésitant pas à publier l’échange sur son compte Twitter, tout en invitant son Premier ministre à s’accorder tout le temps nécessaire à sa complète récupération physique.
Pas d’impact sur la campagne présidentielle
De l’énergie, Amadou Gon Coulibaly en aura sans aucun doute besoin, lui qui a, le 12 mars dernier, officiellement été intronisé comme candidat du RHPD (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix) à la prochaine présidentielle Ivoirienne et, de ce fait, successeur désigné d’Alassane Ouattara. Quid de son état de santé ? « C’est un événement qui peut changer la donne. Ses adversaires vont être tentés d’en profiter », confie auprès de Jeune Afrique un proche de la présidence. Mais si la « tentation » de remplacer au pied levé le candidat est, probablement, grande chez certains, peu d’impétrants semblent en mesure de lui voler la vedette et de s’imposer comme présidentiables.
À commencer par Guillaume Soro, l’ancien premier ministre de Ouattara et ex-président de l’Assemblée nationale : exilé en France, l’ancien chef de la rébellion ivoirienne et candidat déclaré à l’élection d’octobre prochain a récemment été condamné à vingt ans de prison et près de 7 millions d’euros d’amende pour « recel de détournement de deniers publics » et « blanchiment de capitaux ». Sous le coup d’un mandat d’arrêt, et à moins d’une très hypothétique décision contraire en appel, Soro ne pourra donc se présenter à l’élection présidentielle.
Quant à Laurent Gbagbo, tout acquitté qu’il ait été par la Cour pénale internationale (CPI), son sort demeure suspendu aux suites judiciaires qui seront données à La Haye. Enfin, Henri Konan Bédié, président de 1993 à 1999, est handicapé par son âge : à 86 ans révolus, ses chances d’accéder à nouveau à la magistrature suprême sont proches de zéro. En dépit de ses problèmes de santé, la voie semble donc dégagée pour Amadou Gon Coulibaly, qui apparaît comme le seul candidat à même de maintenir la paix durement établie par Ouattara, tout en poursuivant ses projets de modernisation de la Côte d’Ivoire.