EDF a lancé, en octobre dernier, une consultation auprès de l’ensemble de ses équipes, afin de « recueillir leurs expériences » à l’issue des multiples formations proposées par l’électricien. Une piste à suivre, pour l’ensemble des employeurs, alors que la formation en entreprise est perçue comme un vecteur de mobilité et d’insertion professionnelles.
Depuis quelques semaines, le mot d’ordre, parmi les membres de la majorité, est de répéter un peu partout que la France va mieux, après les confinements et mesures sanitaires à répétition. L’un des chiffres avancés, pour illustrer cette remise en forme ? Celui du chômage, qui a retrouvé son niveau d’avant-crise des subprimes, pour s’établir à 8 % de la population active au deuxième trimestre 2021 selon l’INSEE. Oui mais voilà : à trop vouloir se contenter de cette baisse — salutaire, certes —, il ne s’agirait pas d’oublier que le chômage, toujours, est bien présent. Et c’est un problème… dont la solution, en partie, existe.
Récemment, à Lannion (Côte-d’Armor), le géant finlandais des télécoms Nokia s’était engagé à créer 97 postes — après en avoir supprimé plus de 400 l’an dernier. Problème : l’entreprise, qui ne peut compter aujourd’hui que sur 22 ingénieurs, peine à recruter, faute de trouver les compétences qu’elle recherche. Dès lors, lutter de manière efficace et structurelle contre le chômage — ce que tous les gouvernements, depuis trois décennies, cherchent à faire —, ne passerait-il pas par une amélioration préalable de l’offre de formation, visant à réduire l’écart entre les besoins des entreprises et les compétences des candidats ?
Il faut, ici, rendre à César ce qui lui appartient. Oui, le gouvernement avance volontiers que les chiffres du chômage sont bons, alors qu’il s’établit encore à 8 %. Mais reconnaissons tout de même qu’il emprunte la bonne voie, lorsqu’il lance un plan (« Plan pour réduire les tensions de recrutement ») doté de 1,5 milliard d’euros afin de lutter contre l’inactivité de longue durée — et que ce plan fait la part belle à l’investissement dans les compétences, donc la formation des demandeurs d’emploi. Avec des modules différents, selon que l’on est chômeur de longue ou de très longue durée, l’exécutif, qui encourage les formations en situation de travail, va jusqu’à promettre « le plus souvent » une promesse d’embauche à l’issue de la formation.
« Dommages et intérêts »
Ouf de soulagement, chez une bonne partie des économistes, qui commençaient de désespérer devant le louvoiement des gouvernements successifs. Car comme le rappelle par exemple Olivier Babeau dans une tribune aux Echos, « le chômage structurel dont souffre la France ne date pas de la pandémie : en vingt-cinq ans, la proportion de demandeurs d’emplois inscrits depuis plus d’un an est passée de 35 % à 50 % », renseigne-t-il, tout en notant que « le taux de chômage des non diplômés est six fois plus important que celui des titulaires d’un bac+5 ». D’où l’importance — et la bonne nouvelle — du renforcement de la formation afin de lutter contre le chômage de long terme.
L’économiste de mentionner, également, les soft skills, ces « savoir-être » (comportementaux, relationnels, etc.) de plus en plus plébiscités au sein des entreprises, sur lesquels le plan gouvernemental est plutôt silencieux. Alors qu’ils permettent, par exemple, à une « culture d’entreprise » d’exister, au bénéfice, non seulement, de ses dirigeants, mais aussi (surtout) de ses salariés. Avantage de la combinaison formation + soft skills : la mobilité, au sein d’une même boite, est ainsi facilitée. Comme chez EDF, l’un des plus gros recruteurs et employeurs de France, qui déploie une politique de formation ambitieuse à l’égard de ses salariés — plus de 4 millions d’heures ont été dispensées, en 2020, et 71 % des collaborateurs d’EDF ont reçu une formation ! “Le développement des compétences est un atout stratégique pour accompagner les salariés dans leurs parcours professionnels et préparer l’avenir de l’entreprise”, souligne Christophe Carval, DRH du groupe EDF.
L’électricien tricolore vient d’ailleurs de lancer, en octobre dernier, une consultation auprès de l’ensemble de ses équipes (« Parlons Formation »), « pour recueillir leurs expériences de ‘‘formés’’ [et] améliorer l’expérience utilisateur de tous les salariés en formation ». Un exemple, pourquoi pas, à suivre. Car plus qu’une contrainte qui pèserait sur le budget d’une entreprise, la formation — obligatoire — est au contraire un vecteur de développement des compétences au service de la promotion de sa compétitivité, estiment Pauline Miranda et Christophe Girard, avocats spécialisés en droit du travail, dans une tribune aux Echos. De manière plus prosaïque, ces derniers de rappeler, à toutes fins utiles, que « l’employeur qui ne forme pas ou peu ses salariés s’expose, en cas de contentieux, à devoir verser au salarié concerné des dommages et intérêts ».