Les nouvelles mobilités sont à l’intersection de plusieurs écosystèmes en profonde mutation : les transports, avec les innovations autour du véhicule autonome et des usages partagés – au-delà des transports collectifs traditionnels ; et l’énergie, sous le double mouvement de la transition énergétique et du développement des mobilités décarbonées, autour des filières électrique et hydrogène notamment.
Les réseaux de distribution d’électricité, en France comme en Allemagne et en Europe, sont au carrefour de ces évolutions, qui vont se poursuivre et s’intensifier, sur fond de révolution numérique. En France, la transition énergétique est aujourd’hui caractérisée par un mouvement de décentralisation de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, principalement photovoltaïques et éoliennes. Plus de 90 % de la capacité française de ces deux filières sont raccordés aux réseaux de distribution publique d’électricité – plus de 420 000 producteurs totalisant plus de 20.000 MW de capacité. En parallèle les réseaux de distribution publique d’électricité accueillent les infrastructures de recharge pour véhicules électriques ou hybrides rechargeables : plus de 27 000 points de charge accessibles dans le domaine public – soit 42 pour 100 000 habitants. Le développement de la mobilité électrique fait particulièrement sens à partir d’un mix de production d’énergies décarbonées, et le projet de programmation pluri-annuelle de l’énergie prévoit d’accélérer le développement des énergies renouvelables, avec des objectifs de l’ordre de 75 GW de capacités éoliennes et photovoltaïques en 2028, soit plus de trois plus qu’aujourd’hui, et en parallèle celui de la mobilité électrique avec cinq fois plus de véhicules électriques et de points de charge d’ici 2023.
Les infrastructures de recharge pour véhicule électrique ou hybride rechargeable, ainsi que la filière hydrogène, se développent au sein d’un système électrique où émergent peu à peu des systèmes énergétiques locaux, organisés autour des réseaux de distribution d’électricité avec des producteurs valorisant le potentiel énergétique local et des consommateurs, qui pour certains autoproduisent leur énergie – leur nombre a doublé en un an.
Dans ce contexte un premier facteur permettant de faciliter un développement des nouvelles mobilités est l’optimisation des coûts liés au raccordement aux réseaux d’électricité, et aux consommations liées à la recharge, au cours des périodes où le système électrique est peu contraint et l’énergie moins chère – notamment en milieu de journée lorsque la production photovoltaïque décentralisée sur les réseaux basse tension est la plus forte. Les opérateurs de réseaux d’électricité comme Enedis accompagnent déjà les différents acteurs de la mobilité, publics ou privés, pour les aider à optimiser l’implantation des infrastructures de recharge, et le pilotage intelligent des recharges. Un point clé est la mise à disposition de données énergétiques, fiables, sécurisées. Pour répondre à ces besoins, un opérateur comme Enedis s’appuie sur le déploiement à grande échelle de compteurs communicants ou smart grids sur les réseaux basse-tension qui permet de mettre à disposition de chaque acteur les données le concernant, et d’optimiser à l’échelle locale les flux entre producteurs, consommateurs, et infrastructures de recharges. Enedis a prévu d’achever en 2022 le déploiement de son système de compteurs communicants Linky – avec à date mi-2019 plus de 20 millions de compteurs Linky déployés sur les réseaux basse-tension – dont plus de 1,1 millions en région Grand Est.
Un deuxième enjeu lié aux nouvelles mobilités réside dans leur caractère trans-territorial, en particulier transfrontalier, qui nécessite notamment de garantir l’inter-opérabilité des véhicules et des infrastructures de recharge. D’ores et déjà des démonstrateurs européens permettent d’étudier aujourd’hui in situ la pertinence de solutions technologiques ou de modèles d’affaires, qui pourraient être industrialisés demain. C’est le cas notamment du Projet Smart Border Initiative (SBI) une initiative commune des deux gouvernements français et allemands, qui bénéficie d’un financement européen, et auquel les opérateurs de réseaux Enedis et EnergieNetz, filiale d’Innogy, participent. Un des objectifs vise, sur une zone couvrant un million d’habitants, dont 100 000 travailleurs transfrontaliers, et caractérisée par une forte production d’électricité d’origine éolienne, à étudier différents aspects de mobilité transfrontalière entre la Région Grand Est et la Sarre, dans un contexte de forte production d’électricité éolienne : optimisation du positionnement des infrastructures de recharge, interopérabilité, besoin d’itinérance du service, création d’une plate-forme, utilisation des véhicules comme sources potentielles de flexibilité pour le système électrique…
Le développement des nouvelles mobilités pose des défis d’ordre sociétal, technologique, industriel, et d’aménagement des territoires, dans lequel aujourd’hui aucun des acteurs ne détient à lui seul l’ensemble des réponses. Les distributeurs d’électricité ont un rôle clé à jouer pour faciliter le développement de nouvelles solutions de mobilités décarbonées, en coopération avec l’ensemble des acteurs territoriaux, et des différentes filières. Leur couverture territoriale, tant dans les zones urbaines que rurales, et leur position d’acteur neutre vis-à-vis de l’ensemble des parties prenantes tant du système électrique, que du secteur des transports ou de la filière automobile, est un facteur de cohérence et d’homogénéité territoriale. L’ambition d’un opérateur de réseaux d’électricité comme Enedis, est de devenir un partenaire industriel de référence, en raccordant de manière optimale, dans chaque territoire, les infrastructures nécessaires au développement des nouvelles mobilités, et en co-construisant les solutions qui permettront d’industrialiser à moindre coût pour l’ensemble des acteurs les points clés du futur, notamment le pilotage intelligent des recharges et l’interopérabilité des différents systèmes.
Philippe Monloubou, Président du directoire d’Enedis