Renzo Piano est multiple. Sa signature n’est pas évidente : elle est chaque fois inattendue. Marianne Bourgeois le raconte depuis sa naissance en 1937 à Gênes jusqu’à nos jours où l’on entend parler de son œuvre, de ses projets sans cesse et partout. Y compris dans le Paris de demain !
Il n’est pas facile de raconter des promenades, il faut les faire en ouvrant les yeux du cœur et du rêve, et en imaginant le paysage. Comment Gênes, rivale de Venise, forte avec elle de ses combats sur la Méditerranée barbaresque ou turque, ne ferait-elle pas rêver ? L’adolescent a connu aussi la ville du fascisme, des bombardements américains, la ruine, la reconstruction et l’incontournable spéculation immobilière… Et le port sous ses yeux lui a donné le bonheur des bateaux, l’envie de s’exprimer chez lui d’abord mais aussi tout autour de la terre, même si alors ce n’était pas aussi simple !
Renzo Piano a étudié l’architecture à Florence et s’est spécialisé dans les structures : qualité que son œuvre reflète comme nous le savons tous. L’aventure du Centre Pompidou où la souplesse des lignes a cédé à l’ossature vitale du bâtiment fit scandale : les couleurs primaires avaient aussi effacé la douceur des pierres chères à notre patrimoine classique. La coopération avec l’ingénieur sautait aux yeux, or le public voulait ignorer ce passage obligé de la solidité d’une construction. Peter Rice (Opéra de Sydney) demandait que fussent reconnus à l’ingénieur « le droit et la capacité à l’imaginaire ». Le lien également entre l’architecture et la musique a été particulièrement fort puisqu’une des branches du bâtiment, peu connue du grand public a abrité l’IRCAM (Institut de recherche et coordination acoustique/musique) et la très populaire et très visible fontaine Stravinsky.
A Bâle, rupture. A la Fondation d’Art du collectionneur Ernst Beyeler, on retrouve la discrétion. La pierre, les pierres toutes identiques. Un toit léger les surplombe. Toute la lumière est étudiée pour caresser les œuvres.
Osaka : nouveau défi, au milieu de la baie, pour n’exproprier personne des terres plates et cultivables. Tel un porte-avions géant sur l’eau, couvert « d’un toit à la courbe harmonieuse », les ingénieurs appelés à participer se sont empressés autour de l’architecte. Le sculpteur Shingu exposant ses œuvres sous le titre « Le ciel sans limite » pour l’inauguration de l’ouvrage représente brillamment la philosophie zen pour qu’on n’ait pas le sentiment d’un grand écart entre tradition et extrême modernité. Des couleurs ocre et un jardin accueillent le passager pour qu’il oublie le gigantisme de la structure. Pour relier l’air et la mer à la terre ferme un réseau exceptionnel de routes et de trains.
La promenade dans New York est plus facile à suivre car les lieux sont connus et que New York est la ville qui entreprend tout, mélange tout et émerveille toujours. Mais, comme pour les quatre précédentes, elle serait mieux appréciée accompagnée de quelques illustrations choisies.
On regrette l’absence de celles-ci pour soutenir les représentations auxquelles doit se livrer le lecteur. Il voudrait goûter parfaitement la beauté, la rigueur, l’exigence de l’œuvre.
Jeanne Perrin
Bourgeois Marianne
éditions Arléa