Quelles issues pourraient conduire à la résolution de ce conflit ? L’intervention russe en Ukraine a débuté il y a dix-huit mois, et des discussions évoquent à présent la possibilité d’une nouvelle offensive russe à venir. Les débats se concentrent sur la lenteur de la riposte ukrainienne, laissant entrevoir la perspective d’un conflit prolongé jusqu’en 2024 ou 2025. Après dix-huit mois de combats meurtriers, quelles perspectives se dessinent à l’horizon ? Existe-t-il des voies vers la paix ? Y a-t-il un risque d’escalade à l’échelle mondiale ?
Une chose est indiscutable : Vladimir Poutine a échoué dans son objectif initial d’une invasion totale de l’Ukraine depuis le début de cette agression. Cependant, sa détermination à déstabiliser l’Ukraine persiste en l’absence d’une conquête complète. Malgré les revers sur le terrain qui ont rapidement douché les espoirs russes d’une victoire rapide, cela n’a pas ébranlé la volonté du Kremlin de provoquer des destructions.
Scénario 1 : victoire de l’Ukraine
Quelles seraient les conséquences de l’arrivée en nombre et dans les délais requis des blindés et avions occidentaux ? Comment la Russie, en difficulté malgré sa puissance nucléaire, réagirait-elle ? Une telle situation pourrait potentiellement aboutir à un effondrement, rappelant l’humiliation déjà vécue par Moscou lors de l’invasion de l’Afghanistan, un événement ayant contribué à la chute de l’URSS. Une réponse envisagée par la Russie pourrait être un avertissement « non conventionnel » ou une action nucléaire tactique. Depuis le début du conflit, la menace nucléaire est régulièrement évoquée chaque fois que les Russes rencontrent des difficultés. Cette option impliquerait une frappe « tactique » visant une cible moins cruciale que Kiev ou le territoire ukrainien, se produisant en mer ou dans les airs. Cependant, la pression exercée par des acteurs comme la Chine pousse Poutine à éviter cette voie, tout comme la majorité de son camp.
Une telle réaction dramatique de Poutine entraînerait une riposte de l’OTAN, avec le potentiel d’aboutir à un conflit mondial, sans nécessairement impliquer l’utilisation d’armes nucléaires. Bien que les États-Unis et l’OTAN aient clairement mis en garde Poutine contre une telle action, la nature précise de leur réponse reste non spécifiée. Cependant, les options disponibles sont connues. Bien que la possibilité d’une frappe nucléaire tactique de la Russie ne puisse être exclue pour contraindre à des négociations, elle pourrait entraîner d’importantes conséquences.
Dans un autre scénario, une guerre d’usure pourrait pencher en faveur des Russes, car le temps pourrait jouer en leur faveur tandis que l’opinion publique occidentale pourrait s’affaiblir. Toutefois, il reste à déterminer combien de temps les Russes pourraient maintenir cette stratégie. Néanmoins, les problèmes économiques, notamment la chute du rouble et l’inflation, pourraient rendre difficile la poursuite de cette stratégie d’épuisement. Quoi qu’il en soit, il est incontestable que l’avancée de l’armée russe prendrait plusieurs mois.
Scénario 2 : Victoire russe
La réalisation de la conquête totale de l’Ukraine, telle qu’elle était espérée au début de l’invasion, s’est avérée un échec. Dans ce contexte, une alternative partielle pourrait consister en la prise d’une portion du Donbass avec les territoires annexés ainsi que la Crimée. Cependant, une avancée jusqu’au Dniepr, voire au-delà en direction de Kiev, voire même dans les régions occidentales de l’Ukraine, serait une entreprise difficile, voire pratiquement impossible. Si une telle situation se produisait, il serait nécessaire de se préparer à une résistance acharnée de la part de la société ukrainienne, qui serait mobilisée et engagée dans un effort militaire.
Cependant, une victoire de la Russie dans ce scénario serait un échec sans précédent pour l’Occident à l’échelle mondiale. Cela représenterait un recul pour les valeurs qu’il défend ainsi que pour le respect du droit international. Si la Russie l’emportait, cela pourrait entraîner des conflits durables en Europe, car le désir de Poutine et de son système de restaurer l’Empire russe subsisterait. De plus, d’autres nations pourraient être incitées à exploiter la vulnérabilité de l’Occident pour résoudre leurs problèmes territoriaux par la force, à l’instar de la Chine avec Taïwan.
Scénario 3 : À la coréenne
Le troisième scénario à envisager est ce que l’on pourrait appeler le « scénario coréen ». Dans ce cas, aucun des deux camps ne parviendrait à obtenir une victoire décisive, et la perspective de parvenir à un accord de paix serait lointaine, même en cas de négociations pour un cessez-le-feu. Cette situation se transformerait en une guerre d’usure, où l’équilibre des forces resterait figé entre les efforts de reconquête de l’Ukraine et la mobilisation russe. Au fil du temps, les effectifs diminueraient, les arsenaux se videraient et les parties en conflit s’épuiseraient sans voir d’avancées significatives.
Cette évolution pourrait finalement conduire à un conflit gelé, avec éventuellement un accord de partition à l’instar de ce qui s’est produit entre les deux Corées. Il est pertinent de rappeler que durant la guerre de Corée, les troupes communistes étaient initialement proches de la victoire, mais avec le temps, le conflit s’est enlisé. Le résultat fut l’absence de vainqueur et, le 27 juillet 1953, les États-Unis et l’Union soviétique ont accepté l’existence de deux nations distinctes à l’issue d’un conflit qui a engendré la mort de plus de deux millions de personnes.