Le dément : «Le transhumanisme est mort, nous l’avons tué. » Triomphant, arrogant, omniscient, il est mort de la Covid. Lui qui nous vendait l’immortalité, il a tracé d’un doigt sanglant sur les murs de nos prisons virtuelles : «la mort m’a tuer». Il promettait une médecine sans médecin, ils nous ont sauvés. Une chirurgie sans chirurgien, avec leurs gants ils ont vidé les bassins des réas surchargés. Une imagerie sans radiologue, seuls ils ont su interpréter les flocons inédits des poumons de la Covid. Finis les sujets, tout en machines? Des caisses automatiques, des voitures autonomes? Sans les caissières, sans les chauffeurs nous serions morts de faim. Derniers de cordée, hommes et femmes « de peu », « petit personnel », sans eux nous n’aurions pu « traverser la rue ». Il est fini le temps des algorithmes hégémoniques, fi ni l’avènement de l’homme augmenté. Place aux femmes augmentées. Il s’agit de leurs salaires d’abord, des infirmières et des caissières. La guerre contre la Covid s’est transformée en guerre de Religions, un choc des croyances, voire des superstitions. On s’étripe pour un comprimé de chloroquine, pour un masque, un faux nez troussé en papier chiotte ou en carré Hermès. Bien sûr il faut les mettre, et plutôt deux fois qu’une. Mais quelle honte à avouer qu’on ne sait pas pourquoi, qu’il n’existe aucune preuve « scientifique » de leur utilité ? Et alors ? En avons-nous besoin de ces preuves ? C’est l’époque qui le veut. L’épreuve tue les preuves. Bien sûr on va désormais se barder de milliards de masques.
Et puis la prochaine pandémie sera due à une entéro-bactérie, un colibacille K1 résistant à tous les antibiotiques, un véritable tueur, transmis… par l’eau. Alors nos masques on sait où on pourra se les mettre.
Du fond des marigots enfle le caquètement des paons du commentaire, des m’as-tu-vu du PAF, qui étouffent et qui noient la parole des sachants. On parle pour ne rien dire pourvu qu’autour du cou on porte triple tour de chèche aux couleurs du keffieh. À grands coups de menton et larges effets de manche ils nous expliquent enfin ce à quoi eux-mêmes ils ne comprennent rien.
Le soir, ponctuellement à 20 heures, on applaudit. Au premier rang des bons apôtres, des bouts en train des fêtes de charité, des animateurs du bal des faux culs, ceux qui depuis vingt ans nous ont pourri la vie, ont rogné d’une conférence budgétaire à l’autre, nos crédits d’hôpital, ont sacrifié nos postes de soignants, d’infirmières, d’aides-soignantes, d’agents hospitaliers, pour les laisser démunis, seuls, à poil, face au virus qui tue. Ils n’ont pas honte. À leur compassion hypocrite répondent les mots d’Audiard par la voix de Francis Blanche dans les Tontons flingueurs : « ils feraient mieux de fermer leur claque merde ». (Pardon, je cite…)
À l’ombre de la Liberté éclairant le Monde, Donald Trump a prescrit. Tous les malades traités par l’eau de Javel sont morts, mais aucun de la Covid. Conclusion de la Maison-Blanche : l’eau de Javel réduit de 100 % la mortalité par Covid. Alors bon déconfinement…
Jacques Milliez Professeur des Universités, membre de l’Académie nationale de médecine