Facteur économique clé, la mobilité est aussi un élément d’intégration territoriale et européenne qui permet de promouvoir la compétitivité, la transformation numérique, l’entreprenariat et l’innovation tout en accompagnant la transition vers une économie sobre en carbone, la promotion des énergies renouvelables et au développement durable et intégré grâce à des initiatives locales impliquant les citoyens.
L’usager au cœur
Les politiques mises en œuvre au niveau européen favorisent au quotidien la qualité de service et le confort des usagers, la sécurité, le paiement sans contact, la connaissance de l’offre multimodale, la régulation des trafics et des transports collectifs, pour une mobilité plus sûre, plus économe et plus écologique. Pour cela, il est nécessaire d’accroître la connectivité des secteurs de la mobilité, de l’énergie et des TIC au niveau régional.
Désormais, les usagers des transports souhaitent être acteurs de leur mobilité avec un regard de plus en plus exigeant vis-à-vis du respect de l’environnement et de la sécurité. Ce changement de paradigme dans le rapport des usagers à la mobilité oblige les collectivités à redéfinir leurs politiques publiques, ce qui représente une réelle opportunité pour repenser les villes et l’organisation des liens inter territoriaux, répondre aux enjeux sociétaux et supporter le développement économique du territoire.
Véritable marqueur social dans les années 1960 à 2000, la voiture connaît aujourd’hui des transformations et est réinventée pour répondre aux exigences de la ville smart qui envisage une mobilité sur mesure, durable, efficiente, connectée et active avec pour objectif final de diminuer le nombre de véhicules.
Les smartphones offrent également de nombreuses opportunités et permettent à l’usager en tant qu’individu d’envisager sa mobilité comme il l’entend. C’est là la promesse qui lui est faite au travers des innovations qui émergent par le numérique.
La définition de la mobilité de demain croisera les sciences de l’ingénierie et du numérique (Energie, réseaux de télécommunication, IoT, véhicules connectés, partage de l’info en temps réel) avec l’influence des communautés d’usagers plus sensibles à l’environnement et plus coutumiers de l’économie du partage.
Aussi le rapport de la collectivité territoriale à la mobilité évolue mais celle-ci garde une place centrale dans l’accompagnement de ce mouvement de fond en gardant son rôle d’autorité organisatrice des transports et d’accompagnateur du changement (investissement dans des infrastructures, gestion des réseaux énergétiques, volet réglementaire), en devenant également un intégrateur de nouveaux services fournis par tout un écosystème qui se structure autour des technologies suivantes : infrastructures connectées, IoT, protocole de communication performant (4G, demain la 5G, Big Data, IA, Cyber sécurité et en assurant une mobilité entre les territoires).
Une ville inclusive
Pour garantir une ville inclusive, l’un des enjeux est également de réussir à proposer des solutions de mobilité accessibles à toutes et à tous. En effet, tous les citoyens ne sont pas égaux quant à leur rapport au numérique et l’appropriation des nouvelles technologies. Il s’agit donc ici de réinventer la proximité. Pour relever ce défi, l’Eurométropole de Strasbourg a adopté une stratégie digitale qui traite différents sujets comme le Big data. Grâce à l’analyse des données, les territoires peuvent ainsi réorienter certaines de leurs politiques publiques en matière de mobilité, santé, sécurité ou encore de services aux citoyens en fonction des besoins identifiés.
Strasbourg a été parmi les premières collectivités à ouvrir ses jeux de données en 2013, ce qui a permis de faire émerger de nombreuses applications. Nous croyons beaucoup dans l’initiative privée qui représente une forte expertise territoriale et permet de faire émerger des nouveaux business model autour d’idées de produits et services sur lesquels la collectivité n’est pas forcément pertinente.
C’est l’esprit des approches de Living Lab/territoire d’expérimentation et de l’appel à projets « Strasbourg, fabrique de l’innovation » qui a été lancé le 9 octobre 2018 sur la thématique du plan climat 2030. L’idée est de réduire la frontière entre initiative privée et besoin public dans un dialogue gagnant/gagnant où le développement économique profite aux entreprises, à la collectivité et aux besoins individuels des usagers.
À l’occasion de la Bourse ferroviaire en mai 2019, le Port autonome de Strasbourg (PAS) a établi des contacts avec la direction de l’innovation de Fret SNCF qui travaille sur le train connecté et a proposé, au vu de son implantation, d’être un laboratoire pour certaines expérimentations. Les démarches sont actuellement encore en cours de finalisation et une nouvelle rencontre est prévue cet été pour définir le cadre des expérimentations à mener.
De plus, dans le cadre de la coopération des ports rhénans et du projet Upper Rhine Ports a également été développé le Rhine Ports Information System (RPIS) qui permet de réserver ses quais de chargement et prévoir sa durée d’escale. Le travail actuel vise à interfacer RPIS et le River Information service (ou Système d’information fluvial) afin d’avoir une information à forte valeur ajoutée et permettre de prévoir les horaires d’arrivée de bateau et de connaître les données de navigation en temps réel.
Les mobilités de demain impliquent que l’on accepte de reconsidérer nos modèles et de considérer les attentes de nos concitoyens. Le rôle des pouvoirs publics est également de les protéger.
La data est un sujet sensible, elle est source de valeur mais aussi d’utilisation de données privées à des fins non légitimes. Un des défis est lié à la confidentialité et à la sécurisation des données, le piratage récent de certains réseaux sociaux et l’utilisation détournée de données à des fins d’intelligence économique en témoignent. L’entrée en vigueur en mai 2018 du Règlement Européen pour la Protection des Données (RGPD) et de la Loi pour une République Numérique pose un cadre qui doit permettre de garantir un niveau de sécurité et de confiance à nos citoyens et aux entreprises. Aussi, la nécessité de faire émerger des champions européens se fait de plus en plus pressante.
S’agissant du contrôle des technologies de communication, les espoirs autour du programme européen de déploiement de satellites GALILEO sont particulièrement fondés car ce système permettra de s’affranchir de la dépendance vis-à-vis du système GPS américain tant du point de vue des applications (la mobilité en premier lieu) que de la maîtrise, du contrôle des données et de la cybersécurité.
Catherine Trautmann, Ancienne ministre, Vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg