Percutant et documenté, ce livre s’inquiète de la banalisation du négationnisme de gauche.
« L’Allemagne nazie a asservi la nation française, l’Union soviétique seulement ses beaux esprits »… « Les crimes nazis ont été jugés à Nuremberg dans l’assentiment général, alors que les crimes communistes n’ont jamais fait l’objet en Occident d’un seul procès, fut-il moral ». Comme il est naturel, l’opinion, « humiliée d’avoir été trompée si longtemps », continue de fermer les yeux, génération après génération, sur ce « refus qui a asservi les intelligences ».
Comment pourtant, sans réagir à ce déguisement du passé, comprendre le présent et affronter un avenir difficile ? Comment éclairer l’omniprésence de Poutine, l’essor de la Chine, la tiédeur européenne des pays d’Europe de l’Est ? Pourquoi oublier en 1939 le pacte germano-soviétique ? Lorsqu’il fut suivi d’un ralliement aux « alliés » ceux-ci ont désormais fermé les yeux sur le régime : sans son armée écrasante, on ne pouvait prendre en tenaille l’armée du Reich. En remerciement on lui offrait un ensemble de nations proches depuis des siècles. Elles seraient asservies sans secours pour un demi-siècle… Et la « Patrie des droits de l’homme » votait « pour » ou se taisait trop…
On peut aller jusqu’à dire que le communisme est né en Europe, puisant ses racines dans le christianisme. Seul Jésus dans l’histoire a dit « Les premiers seront les derniers » et Marx l’a traduit par la dictature du prolétariat. Ayant conquis « le monopole de l’espérance », « la lutte des classes est devenue Le moyen d’avancer dans l’histoire ». Surtout quand c’est par un Grand Bond en Avant ! (L’Orient pourrait aussi avoir fourni des sources avec le mondialisme du djihadisme conquérant ?)… La mort, la réduction au pire esclavage sont le lot des peuples entiers ou des communautés « choisies » dans les programmes des Rouges ou des Bruns, nos enfants des écoles n’en sont instruits que partiellement (partialement) : « le sens de l’histoire est un couteau suisse » qui permet de faire triompher une opinion plutôt qu’un fait, « il donne de l’assurance à ceux dont la mission est de transmettre le savoir »…
Les crimes ont du mal à sortir de l’oubli. Suffit-il de sur-célébrer le souvenir de la Shoah pour avoir bonne conscience ? Dans de très nombreux pays d’Asie « le drame dépasse l’entendement ». Cambodge, Viet Nam, Philippines, sans parler de la Chine. On affirme qu’atteindre une société idéale justifiait bien quelques sacrifices humains. Ainsi à Cuba où les lendemains qui chantent ne sont arrivés que dans l’imagination des universitaires, des artistes et des acteurs « engagés ». Les revues les plus élégantes de la Rive Gauche ont répandu les propos de négationnistes. Admirés, au nom de la liberté d’information ils ont propagé une désinformation obstinée et prospère ! Des générations d’étudiants ont applaudi leurs cours. Sartre écrivit que « l’anticommuniste [est] un chien », comment juge-t-on ces propos aujourd’hui ? Avec la plus grande indulgence : un lapsus sans doute du grand homme ?
Pour ne pas vilipender individuellement tous ceux qui n’ont pas résisté au charme du communisme, de près ou de loin et souvent en jouissant de biens matériels solides sans les partager, regardons en toute simplicité comment chaque alternance politique garantit de nouveaux baptêmes de rues et les lieux qui s’ajoutent à la liste impressionnante des Lénine, Eluard, Aragon : « J’écris ton nom liberté »( ?), « Je chante le Guépéou nécessaire de France/ Je chante le Guépéou de nulle part et de partout/ » etc… Et aussi des plus obscurs qui se retrouvent même dans les beaux quartiers. S’agissant de personnalités vivant encore et dans les brillants habits de l’intelligentsia, on préfère ignorer qu’ils ont connu ou aidé le régime de l’Est ou admiré sans réserve le maoïsme. S’agissant d’étoiles récemment disparues, à quoi bon effacer l’éclat de leur génie ?
Le communisme est éteint mais il brille encore.
Jeanne Perrin