Le Liban est toujours impacté par les effets de l’effondrement économique et financier survenu fin 2019 et que la Banque mondiale considère comme « l’une des pires crises au monde depuis 150 ans. Si la faillite libanaise entraîne la dépréciation de la monnaie nationale, la chute du pouvoir d’achat et la destruction du système de protection sociale, elle provoque aussi une forte hausse du nombre de mariages précoces.
La crise économique du Liban a provoqué une régression de divers indicateurs sociaux et sociétaux. L’une des manifestations la plus évidente est l’augmentation du nombre de mariages précoces. Selon une étude de l’association « Rassemblement féminin démocratique libanais », 20% des mariages de l’année dernière concernait des mineurs des deux sexes, contre 6% en 2016. 97% de ces mariages précoces impliquent des jeunes filles.
L’étude indique également que 10% de ces unions comprennent des adolescentes âgées de 13 à 15 ans. La grande partie des mariages de mineur(e)s s’effectue dans le nord de la plaine orientale de la Bekaa, territoire où les traditions claniques et tribales restent solidement ancrées. Cette forte hausse est liée à la crise économique qui a gravement appauvri la population, et alimenté la déscolarisation, surtout chez les jeunes filles.
Les mariages précoces sont légion chez les réfugiés syriens
L’étude s’est basée sur un échantillon de 1 300 personnes vivant au Liban. Mais le mariage précoce est particulièrement important chez la communauté syrienne au Liban, évaluée à plus de deux millions de personnes, soit 25% de la population. Un quart des Syriens des deux sexes ont été mariés avant l’âge de 18 ans l’année dernière. Une large majorité de jeunes filles est concernée. On estime que 80% des mineurs syriens sont déscolarisés à cause de l’insécurité économique et sociale à l’œuvre dans les campements.
Face au phénomène, la Commission parlementaire des droits de l’homme a approuvé, en septembre 2023, un projet de loi qui criminalise les mariages de mineur(e)s en imposant des sanctions aux parents. Ce projet doit toutefois être examiné par d’autres commissions, puis voté durant une seconde plénière du parlement, pour devenir une loi. Pour le moment, rien n’a été fait pour accélérer la procédure.
La plupart des communauté religieuses consentent le mariage des mineurs
La structure du confessionnalisme politique à l’œuvre au Liban autorise les communautés religieuses à gérer les statuts personnels. Les chefs spirituels sont donc indispensables pour les mariages, les divorces ou encore les héritages. La pénalisation du mariage précoce ne pourra pas être approuvée sans leur accord. Dans la mesure où la mariage des moins de 18 ans est consenti par la plupart des communautés religieuses, il reste du chemin à parcourir avant de les convaincre à l’interdire.