Celui qui assurait les fonctions de maire de Londres depuis 2008 est membre du Parlement. Mais aussi un journaliste bien documenté qui consacre ici un ouvrage important à Sir Winston dont il est fort admiratif puisqu’il sous-titre son ouvrage : « Comment un seul homme a fait l’histoire ».
Au début était la guerre, et il y eut encore la guerre, et le grand « Winston » s’y montra exceptionnel… On le voit, le 28 mai 1940, dominer un Conseil entre sept personnages de l’Etat. Il est alors le Premier ministre tout nouvellement nommé. Question : Va-t-on entrer en guerre pour réagir aux destructions sans merci infligées au Continent par l’armée du Reich ? N’épargnerait-on pas des vies et des ravages par un accord entre gens… de la même famille ? Par l’entremise de Mussolini ? (On appelait révisionniste la tendance d’opinion britannique à voir en cet accord la paix et l’indépendance du royaume.) Ce jour-là, Churchill impose son choix qui est de se battre et de ne pas négocier…
Reprise de l’ordre chronologique. Né dans le palais des Spencer, d’une mère ravissante et d’un homme politique de lignée ducale, celle des Marlborough. Etudes peut-être pas assez brillantes pour un jeune homme de ce rang, il est vite engagé dans une épopée guerrière outre-mer : Inde, Soudan, Afrique du Sud où il ne cesse d’être un correspondant de guerre à la plume riche et acérée (et qui lui rapporte !). Entré très vite en politique, tout aristocrate qu’il est, il méprisera des Tories lesquels le lui ont bien rendu. Il commet des erreurs tristement célèbres, par exemple en 1905, Lord de l’Amirauté, il conduit les Français avec lui au désastre de Gallipoli ; il se trompe en attaquant les Allemands à Anvers en 1914… Seulement, c’est lui qui invente le tank, voiture puissante à chenille capable d’avancer, monter ou descendre sur des terrains bouleversés. Seulement, il dénonce les clauses du traité de Versailles qu’il faudra payer du prix du sang et de la honte… Seulement, il tranche, et il sait agir !
Boris Johnson a fouillé une documentation énorme pour émailler une biographie, tout de même sans surprise, de mille anecdotes. Il reconstruit les dialogues, précise les situations et même décrit les costumes et les menus gestes avec une verve qui fait un peu regretter que ce soit la traduction (ô combien difficile de l’humour anglais) qui soit sous nos yeux. Mais pour en savoir encore plus sur ce héros de l’histoire, il n’est que de se plonger dans ses Mémoires. Même occupant les plus hautes fonctions de l’Etat, Churchill n’a cessé d’écrire, c’était son droit. Son œuvre immense est couronnée par le prix Nobel. Pendant 60 ans, il fut journaliste, député, homme d’Etat, écrivain et peintre ! Il fut aussi mari : on ne peut résister à révéler que sa darling Clementine fut très aimée, très aimante, et tout de même tentée par un petit pas de côté pour revenir toujours éprise et…pardonnée « dans les bras » de son grand homme, comme ils l’on écrit l’un et l’autre. Femme admirable que le gouvernement, à la mort de son époux, nomma « pairesse en son nom propre » en reconnaissance de ce que son appui a eu d’irremplaçable dans les audaces et les succès de Sir Winston, et donc de la politique britannique…
En 1944, le « destin du monde est en équilibre sur la balance » ; Churchill monte lui-même à 69 ans sur le HMS Belfast pour surveiller les bombardements sur les côtes normandes ! Il avait auparavant convaincu Roosevelt de l’aider jusqu’à son entrée en guerre (ainsi la stature de De Gaulle se trouva-t-elle affaiblie face aux deux amis-alliés anglais et américains, ce dont le livre fait peu de cas). Après l’armistice, Churchill dit à son médecin : « J’ai le sentiment d’avoir accompli mon travail. » « Luttez contre ces maudits socialistes, je ne crois pas en leur meilleur des mondes. » Et il continua d’écrire…
1960 : Aristote Onassis réunit sur le yacht Christina une élite de célébrités, pour remonter l’Hudson vers la 79e rue. Le plus glorieux devant qui il lève son verre est Winston Churchill, 86 ans, fatigué… Celui-ci avait façonné l’histoire du Moyen-Orient, démantelé l’Empire, sauvé l’Europe. Il était grand, pour le meilleur et pour le pire, selon les points de vue… mais d’une toujours « prodigieuse énergie »…
Jeanne Perrin
Johnson Boris
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