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L’éducation du Malaise dans la culture

Revue Passages Publié par Revue Passages
1 juillet 2018
dans Non classé
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L’éducation du Malaise dans la culture
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Comme chacun sait, Freud a parlé de trois professions impossibles : gouverner, enseigner, psychanalyser. Dans cette table ronde nous sommes supposés parler de deux de ces impossibilités en même temps : l’éducation et la psychanalyse. Je vais essayer d’examiner si ces deux difficultés se multiplient ou s’annulent. Tout d’abord, rien de paraît plus étrange que de parler d’une fonction éducative de la psychanalyse : la règle fondamentale de la psychanalyse, c’est de laisser parler librement, de laisser venir les images et les associations.

C’est le contraire de l’éducation qui impose des règles rigides, et une certaine privation de liberté. Du côté de la psychanalyse, la liberté de la parole découvre des forces pulsionnelles et sexuelles qui sont le contraire de la bonne éducation, qui fait silence sur l’érotisme et les pulsions : elles sont toutes sévèrement réprimées. Il semble donc y avoir une contradiction insurmontable entre psychanalyse et éducation. Contradiction encore plus complète si l’on aperçoit que la liberté de la parole en analyse découvre une prison, la prison de la répétition et des symptômes, alors qu’au contraire la prison de l’éducation apporte une liberté. Donc, si l’on considère seulement leurs méthodes respectives, il semble y avoir peu de compatibilité entre psychanalyse et éducation. D’ailleurs cela se voit tout de suite : si un éducateur laisse à un enfant la liberté de suivre son propre chemin, il obtiendra de maigres résultats et si un psychanalyste donne des conseils éducatifs à ses patients, il sera impossible d’analyser le refoulement.

Et pourtant, si l’on regarde maintenant l’objectif culturel de la psychanalyse, si l’on considère l’importance du Malaise dans la culture et ses conséquences, elle a sans conteste un rôle éducatif. Ce malaise entraîne une violence constante, de même qu’un besoin de rêver si grand qu’il concerne les deux commerces mondiaux les plus florissants, c’est-à-dire les ventes d’armes et la drogue. Jusqu’à maintenant aucun progrès des sciences n’arrive à calmer ce malaise. Alors que toutes les richesses, la santé, une amélioration du niveau de vie sont à portée de main, la volonté de domination et d’asservissement d’autrui demeure au centre de la culture. L’éducation culturelle qui intéresse la psychanalyse doit être comprise en fonction de ce malaise spécial. Il ne s’agit pas de l’éducation des arts, des sciences et des techniques, mais de l’éducation du malaise. D’ailleurs avant même de l’éduquer, il faut déjà le comprendre. Qu’est-ce que ce malaise ? D’où vient-il ? Comment et pourquoi fonctionne-t-il ? C’est un malaise qui résulte des contraintes même de la Culture, à commencer par l’interdit universel de l’inceste lui-même.

La responsabilité de l’interdit de l’inceste est prêtée à un père, et c’est pourquoi ce père est voué à un fantasme parricide. Ce fantasme parricide provoque une telle culpabilité qu’il onde la loi, une culpabilité si forte qu’elle est inconsciente. C’est pourquoi elle ne peut être éduquée par les moyens éducatifs conscients.

C’est un malaise qui résulte de la coercition morale du père mort, c’est-à-dire de celui qui est symbolisé par le père des religions. Dieu est le symbole du père et il a toujours été le lieu des sacrifices pour se faire pardonner, et avant le siècle des Lumières et les Révolutions française et américaine, les femmes hystériques s’adressaient à Dieu et aux prêtres pour exorciser le diable. Freud écrivit un article sur une névrose démoniaque au XVIIe, et c’est en tant que neurologue qu’il découvrit la psychanalyse, en écoutant les hystériques au XIXe siècle. Il y a incontestablement une relation d’inverse proportionnalité entre l’influence de la psychanalyse et celle de la religion. Partout où la religion est puissante, partout la psychanalyse reste marginale.

Vous pourriez contester cet argument, en disant qu’aux Etats-Unis par exemple, la religion est certes puissante, mais elle correspond à un athéisme et à un matérialisme pratique. Et pourtant la psychanalyse a connu une certaine désaffection dans les cinquante dernières années. N’est-ce pas parce qu’en fait, la montée en puissance du libéralisme correspond à un commandement théologico-politique ? C’est ce qu’a montré le livre de Max Weber : Le protestantisme et l’Esprit du capitalisme. Ceux qui gagnent beaucoup d’argent sont les élus de Dieu, et ceux qui n’ont pas ce bonheur sont les damnés, selon la parabole du bon semeur, telle qu’elle a été commentée par Luther. La richesse est le signe du pardon de Dieu, et elle justifie la violence. Les intégristes ne sont pas seulement du côté des djihadistes, et les capitalistes ne sont pas seulement des jouisseurs assoiffés de consommation. Car devenir riche est un signe de l’élection divine. La croyance et l’éducation de la croyance reste donc au centre du malaise dans la culture, il existe donc une nécessité de croire toujours aussi féroce à notre époque que dans les précédentes, et elle se traduit par la

violence.

On aurait pu penser que la science pouvait faire reculer l’obscurantisme religieux, car après avoir eu un rôle civilisateur pendant des siècles, la religion est aujourd’hui devenue une source d’obscurantisme et de conflit. Mais la science elle-même est devenue une nouvelle religion !

Tous les mois des neuroscientifiques découvrent les gènes de certains comportements : de la schizophrénie et même de la jalousie : c’est un rêve d’innocence produit par la science elle-même.

Il existe une idéologie scientifique qui est largement au service d’un rêve d’innocence et de pureté. La science est devenue une machine à rêve à la place de la religion. C’est bien le contraire de la psychanalyse qui montre ce qu’il y a de diabolique dans le désir humain. L’objectif thérapeutique de la psychanalyse est de calmer l’angoisse, et par conséquent elle devrait avoir un rôle civilisateur. Quel a été le premier but de la psychanalyse ? Lever les symptômes, qui font souffrir le corps, parce qu’ils sont inconscients, parce qu’ils résultent d’un désir refoulé. Et rendre ces symptômes conscients veut dire leur rendre un sujet par la parole, car seule la parole possède un sujet. A l’origine, le sujet a été refoulé en même temps que son désir incestueux et cela dès l’enfance, car ce sont les enfants d’abord qui ont un désir incestueux pour leurs parents et pas le contraire. Cela veut dire qu’exactement en même temps que la levée des symptômes, qui résultent du refoulement, l’objectif final de la psychanalyse est de dissoudre le complexe d’Œdipe. Le complexe d’Œdipe repose en réalité sur une loi scientifique forte qui est celle de l’interdit de l’inceste. C’est une Loi scientifique universellement appliquée, c’est une loi générale sur laquelle s’appuie le complexe d’Œdipe. Qu’est-ce que cette loi de l’interdit de l’inceste ? On la ramène parfois d’une manière simpliste à l’interdiction faite par le père de la jouissance de la mère. En réalité c’est seulement chez les gorilles, chez les singes que les mâles les plus puissants interdisent aux plus faibles, donc aux enfants de jouir de leur mère. Pour l’être humain, c’est tout à fait différent, l’interdit de l’inceste succède à la parole, au fait de parler. C’est un interdit de l’inceste qui fonctionne dès l’enfance, dès que le cri du nourrisson prend une signification. Lorsque l’enfant crie par la bouche, il s’entend par l’oreille, et son propre cri lui fait peur : ensuite il continue de crier parce qu’il crie.

Il crie parce que le cri qu’il entend, le sien donc, est chargé de la demande de sa mère, c’est-à-dire une demande incestueuse qui lui fait peur. Il existe donc une phobie spontanée de l’inceste chez tous les enfants. Les enfants veulent se séparer de leur mère en même temps qu’ils rêvent de ne pas se séparer. C’est ce rêve qui provoque la naissance de la vie psychique. Il existe un rêve puissant de retrouver sa mère, de garder son amour tout en la quittant. Mais se séparer de sa mère est coupable et c’est ainsi que les enfants s’inventent spontanément un père qui les punit, un père qui les bat. C’est la naissance du père et du fantasme « un enfant est battu ». Il n’y a pas besoin d’aller consulter les livres de Darwin pour comprendre que c’est dans les premiers cauchemars de l’enfant que se produit la naissance du père primitif, du père qui bat. De sorte que la phobie spontanée primitive de l’inceste avec la mère se transforme en phobie d’être dévoré ou sodomisé par le père primitif des cauchemars, l’ogre ou le loup, qui est mis à mort dans le fantasme parricide à cause de son désir incestueux. L’angoisse du désir incestueux du père a comme conséquence la naissance du fantasme parricide, celle du totémisme et des religions qui lui succèdent.

C’est ainsi que le totem, ou les premières phobies de l’enfant, sont à la fois le symbole de l’amour du père et le signe du vœu parricide de l’enfant. La phobie spontanée de l’inceste avec la mère se termine en désir du père, en un désir fou dans l’amour fanatique des foules pour un père (vater sehnsucht). C’est à partir de ce retournement, que naît cet amour des foules pour le père qui est la source de la violence religieuse. Ainsi s’installe une croyance en un retour spirituel du père, qui va pardonner, et c’est ce qui fonctionne désormais comme la Loi. Car ce n’est pas le père qui fait la loi, mais le père mort. Cette croyance est à la source d’une violence constante, qui naît bien avant la naissance du capitalisme dont j’ai dit que c’était aussi une forme d’intégrisme. Ce n’est qu’une forme moderne du commandement théologico-politique qui régit la violence actuelle de la mondialisation. C’est la croyance en un retour du père, qui va enfin accorder au fils son pardon. C’est écrit sur chaque dollar : In God we trust.

C’est ici que l’on peut peut-être apercevoir le rôle éducatif de la psychanalyse, par rapport à cette éternelle violence. Car le mot « croyance » a une particularité vraiment spéciale : la « croyance » fait partie des mots primitifs à double sens, « croire » c’est aussi bien « croire à » que « croire que ». Si je dis que « je crois que », cela veut dire que je doute. Et si je dis « je crois à », cela veut dire que je suis fanatisé par ma croyance. Les affrontements interculturels se déroulent sur le fond d’une guerre entre les croyances et en ce sens toute guerre est une guerre de religion, c’est-à-dire qu’il faut la faire en fonction de la rédemption, pour le pardon du père mort. Et cela alors même qu’il semblerait que seuls des intérêts économiques sont en jeu.

J’en reviens maintenant à l’enjeu de la fin de la psychanalyse qui est celle de la dissolution du complexe d’Œdipe. Si cela se produit, ce sera aussi la naissance d’un nouveau rapport à la croyance. Car tous les pères ou tous les futurs pères qui rentrent en analyse savent qu’ils ne sont que des fils. Des fils qui ont voulu remplacer leur père qui est toujours à cet égard un père mort, un père totémisé. L’analyse jette donc un doute sur le fanatisme de la croyance, le doute rationnel, la relativité des croyances est certainement le gain culturel le plus important d’une analyse de ce point de vue. Un homme qui termine son analyse sait qu’il n’a pas terminé. Il doute. C’est pour ce motif fondamental que le père est toujours douteux, comme l’a dit le droit romain : pater semper incertus. Car le père n’est jamais qu’un fils. Dans le sens même de la parabole luthérienne du bon semeur, la psychanalyse jette une graine, celle du doute. D’un doute qui, on peut l’espérer, finira par être civilisateur.

 

Gérard Pommier*

*Professeur de psychologie, université Paris-VII, Psychanalyste

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